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Arrêt maladie longue durée salaire : calcul des indemnités, maintien de la rémunération et règles de la sécurité sociale

Arrêt maladie longue durée salaire : calcul des indemnités, maintien de la rémunération et règles de la sécurité sociale

Arrêt maladie longue durée salaire : calcul des indemnités, maintien de la rémunération et règles de la sécurité sociale

Un arrêt maladie longue durée pose presque toujours la même question : « Combien vais-je toucher, et pendant combien de temps ? » Derrière cette inquiétude légitime, le système français mélange indemnités de la Sécurité sociale, maintien de salaire par l’employeur, conventions collectives, mutuelles et prévoyance. Résultat : beaucoup de salariés ne savent pas réellement à quoi s’attendre.

Dans cet article, on fait le tri. Objectif : vous permettre d’anticiper l’impact financier d’un arrêt longue durée, de comprendre vos droits et de limiter les mauvaises surprises.

Arrêt maladie longue durée : de quoi parle-t-on exactement ?

Avant de parler de salaire, il faut clarifier les notions. En pratique, on parle souvent « d’arrêt longue durée » pour :

  • un arrêt de plus de 30 jours ;
  • une succession d’arrêts pour la même pathologie ;
  • ou une affection de longue durée (ALD) au sens de la Sécurité sociale (cancer, diabète, etc.).
  • Mais attention : l’expression « longue durée » n’a pas exactement la même signification pour :

  • la Sécurité sociale (qui regarde surtout la durée totale d’indemnisation) ;
  • votre employeur (qui suit les règles du Code du travail et de votre convention collective) ;
  • votre organisme de prévoyance (qui déclenche ou non des garanties à partir d’une certaine durée).
  • C’est ce qui rend le sujet complexe. Pour y voir clair, il faut d’abord comprendre le socle : les indemnités journalières de la Sécurité sociale (IJSS).

    Comment la Sécurité sociale calcule vos indemnités journalières ?

    Les indemnités journalières sont la base de votre revenu pendant un arrêt maladie. Elles ne compensent jamais 100 % de votre salaire. Leur calcul dépend de deux paramètres :

  • votre salaire de référence ;
  • un pourcentage appliqué à ce salaire.
  • 1. Le salaire de référence

    Pour un arrêt maladie classique (hors accident du travail ou maladie professionnelle), la Sécurité sociale prend en compte :

  • vos trois derniers bulletins de salaire avant l’arrêt ;
  • le montant brut soumis à cotisations ;
  • dans la limite du plafond de la Sécurité sociale.
  • On calcule un salaire journalier de base :

    Salaire journalier de base = (Total des 3 derniers salaires bruts) / 91,25

    Exemple concret :

  • Vos trois derniers salaires bruts : 2 500 €, 2 600 €, 2 500 €.
  • Total : 7 600 €.
  • Salaire journalier de base ≈ 7 600 / 91,25 ≈ 83,25 €.
  • 2. Le pourcentage appliqué

    En arrêt maladie non professionnel, l’indemnité journalière (IJSS) est en principe égale à :

  • 50 % du salaire journalier de base ;
  • avec un plafond (révisé chaque année).
  • Dans notre exemple :

  • 50 % de 83,25 € ≈ 41,62 € d’IJSS par jour.
  • Sur un mois de 30 jours, cela représente environ 1 248 € bruts, au lieu de 2 500 € de salaire brut.

    3. Le délai de carence

    La Sécurité sociale applique un délai de carence de 3 jours pour un arrêt maladie classique :

  • Les IJSS ne sont versées qu’à partir du 4ᵉ jour d’arrêt.
  • Conséquence : pour un arrêt court, la perte peut être importante. Pour un arrêt longue durée, ces trois jours restent marginalement importants, sauf si l’employeur les compense (convention collective, accord d’entreprise, etc.).

    Maintien de salaire par l’employeur : quelles règles ?

    Les IJSS ne sont qu’une partie de l’histoire. Dans beaucoup de cas, l’employeur doit compléter pour limiter votre perte de revenu.

    Le Code du travail (article L1226-1) prévoit un dispositif de maintien de salaire, sous conditions :

  • avoir au moins 1 an d’ancienneté dans l’entreprise ;
  • avoir transmis le certificat médical dans les délais (48 heures en général) ;
  • être soigné en France ou dans l’UE/EEE ;
  • ne pas être travailleur à domicile, saisonnier, intermittent, etc. (qui ont des règles spécifiques).
  • Si ces conditions sont réunies, l’employeur doit (sauf dispositions plus favorables) :

  • verser un complément permettant d’atteindre 90 % du salaire brut les 30 premiers jours d’absence ;
  • puis 66,66 % (2/3) du salaire brut les 30 jours suivants ;
  • avec une majoration de la durée en fonction de l’ancienneté (10 jours de plus par période de 5 ans, jusqu’à 90 jours).
  • Important : ces montants incluent les IJSS. L’employeur complète donc ce que paie la Sécurité sociale pour arriver aux pourcentages prévus.

    Concrètement, comment ça se passe sur votre fiche de paie ?

  • Vous percevez vos IJSS (directement par la CPAM ou via l’employeur en cas de subrogation) ;
  • Votre employeur verse un « complément employeur » pour atteindre le niveau de maintien prévu ;
  • Les IJSS sont souvent déduites de votre brut, puis réintégrées en bas de bulletin, ce qui rend la lecture parfois difficile.
  • Résultat : votre net à payer peut baisser, mais largement moins que si vous n’aviez que les IJSS.

    Le rôle de la convention collective et de la prévoyance

    Le Code du travail fixe un minimum. Votre situation réelle dépend de deux autres piliers :

  • votre convention collective ;
  • votre contrat de prévoyance (souvent collectif, parfois individuel).
  • 1. Les conventions collectives

    Beaucoup de conventions collectives sont plus généreuses que la loi. Elles peuvent prévoir :

  • un maintien de salaire à 100 % du brut pendant une période déterminée ;
  • un allongement de la durée du maintien (par exemple 90 jours ou plus) ;
  • la suppression du délai de carence de l’employeur ;
  • des conditions spécifiques pour les arrêts longs, les hospitalisations, les ALD…
  • Exemple fréquent : dans certaines conventions du secteur tertiaire, un cadre avec plus de 3 ans d’ancienneté peut être maintenu à 100 % de son salaire pendant trois mois, voire plus.

    2. La prévoyance

    La prévoyance intervient généralement :

  • au-delà d’un certain délai (par exemple 90 jours d’arrêt) ;
  • pour garantir un pourcentage de la rémunération, souvent en net ;
  • jusqu’à la reprise du travail ou la mise en invalidité.
  • Dans les faits, la prévoyance permet souvent de remonter le niveau global de revenu (IJSS + employeur + prévoyance) à un niveau plus confortable, par exemple :

  • 70 % ou 80 % de votre ancien salaire net ;
  • parfois plus, selon les contrats cadres.
  • Point de vigilance : tous les salariés ne bénéficient pas d’une prévoyance identique. Et dans certaines petites structures, il n’y en a tout simplement pas, ou seulement pour les cadres.

    Arrêt maladie longue durée : combien de temps êtes-vous indemnisé ?

    Les indemnités de la Sécurité sociale ne sont pas illimitées. Il existe des plafonds de durée, avec deux grands cas de figure.

    1. Maladie « classique » (hors ALD)

  • Maximum de 360 jours d’indemnisation sur une période de 3 ans ;
  • Ces 360 jours incluent tous les arrêts pour maladie « simple » (non ALD) sur cette période.
  • En clair : si vous enchaînez des arrêts de quelques semaines pendant trois ans, vous pouvez atteindre ce plafond.

    2. Affection de longue durée (ALD)

  • En cas de maladie reconnue en ALD, la durée maximale d’indemnisation peut aller jusqu’à 3 ans (1 095 jours) ;
  • Les soins liés à l’ALD sont pris en charge à 100 % (sur la base du tarif Sécu), mais cela ne signifie pas que votre salaire est maintenu à 100 %.
  • À l’issue de ces périodes, si votre état de santé ne permet pas la reprise :

  • la reprise peut être envisagée en mi-temps thérapeutique (avec indemnisation partielle) ;
  • ou la CPAM peut étudier une mise en invalidité, avec pension invalidité.
  • L’impact sur votre rémunération devient alors plus lourd. C’est un moment clé pour faire le point avec votre RH, votre médecin du travail et éventuellement un conseiller en évolution professionnelle.

    Cas pratiques : combien touchez-vous vraiment ?

    Pour rendre le sujet concret, prenons trois profils. Les montants sont simplifiés pour illustrer.

    Cas 1 : salarié non cadre, 2 000 € brut, 2 ans d’ancienneté, convention peu favorable

  • Salaire brut mensuel : 2 000 € ;
  • Salaire journalier de base ≈ (2 000 x 3) / 91,25 ≈ 65,75 € ;
  • IJSS ≈ 50 % → 32,87 € / jour, soit environ 986 € / mois (pour 30 jours).
  • Avec le minimum légal de maintien de salaire :

  • Les 30 premiers jours : environ 90 % du brut → ≈ 1 800 € brut (IJSS + complément) ;
  • Les 30 jours suivants : environ 66,66 % du brut → ≈ 1 333 € brut ;
  • Au-delà : seulement les IJSS, sauf accord plus favorable.
  • Résultat : passé les premiers mois, le revenu chute nettement.

    Cas 2 : cadre, 3 500 € brut, 6 ans d’ancienneté, convention avantageuse + prévoyance

  • 3 derniers salaires bruts : 3 500 € ;
  • Salaire journalier de base ≈ (3 500 x 3) / 91,25 ≈ 115,07 € ;
  • IJSS ≈ 50 % → 57,53 € / jour, soit ≈ 1 725 € / mois.
  • Convention collective :

  • maintien à 100 % pendant 90 jours ;
  • prévoir ensuite un relais prévoyance à 80 % du net.
  • Concrètement :

  • Les 3 premiers mois : salaire quasiment inchangé ;
  • Ensuite : environ 70–80 % du net antérieur, grâce à la prévoyance.
  • Impact : la baisse existe, mais elle reste limitée, ce qui permet de faire face plus sereinement à l’arrêt longue durée.

    Cas 3 : salarié sans ancienneté (moins d’1 an), 1 800 € brut

    Ici, pas de maintien légal de salaire par l’employeur (sauf dispositions plus favorables de la convention).

  • Le salarié ne touche que les IJSS à 50 % ;
  • Éventuellement un complément de prévoyance si le contrat le prévoit dès le début, ce qui est rare.
  • Résultat : la perte financière est très forte, souvent plus de 40 % du salaire net.

    Les erreurs fréquentes qui coûtent cher

    Sur le terrain, les mêmes erreurs reviennent. Elles aggravent l’impact financier de l’arrêt.

  • Ne pas vérifier sa convention collective : beaucoup de salariés ignorent qu’ils ont droit à un maintien de salaire amélioré… ou au contraire surestiment leurs droits.
  • Envoyer l’arrêt en retard : en dépassant les 48 heures, certains employeurs peuvent suspendre le complément, au moins temporairement.
  • Confondre prise en charge à 100 % et maintien de salaire : une ALD ne signifie pas que vous serez payé à 100 %, seulement que vos soins sont remboursés à 100 % par la Sécu.
  • Ne pas anticiper la durée : beaucoup vivent comme si l’arrêt allait durer « quelques semaines », alors que les médecins, eux, parlent de mois.
  • Ignorer la prévoyance : soit on ne lit jamais le contrat collectif, soit on néglige d’en souscrire une en individuel.
  • À l’inverse, un salarié informé peut limiter la casse en agissant tôt.

    Comment anticiper et protéger votre rémunération ?

    Vous ne choisissez pas toujours de tomber malade. En revanche, vous pouvez préparer le terrain, surtout si vous savez que vous avez une pathologie lourde ou un risque identifié.

    1. Faire un audit rapide de votre protection actuelle

  • Relisez votre contrat de travail : y a-t-il des mentions sur le maintien de salaire ?
  • Consultez votre convention collective (souvent disponible en ligne ou via les RH) ;
  • Demandez à votre employeur ou à votre service RH une notice de prévoyance à jour ;
  • Vérifiez les délai de carence, les taux de remplacement (en % du brut ou du net), la durée maximale d’indemnisation.
  • 2. Faire ses calculs avant d’être en arrêt longue durée

    Vous n’avez pas besoin de viser la précision au centime près. L’objectif est d’avoir un ordre de grandeur :

  • Combien représentent 50 %, 66 % et 80 % de votre rémunération nette actuelle ?
  • Seriez-vous capable de tenir plusieurs mois avec ce niveau de revenu ?
  • Quelles charges fixes pourriez-vous ajuster (crédit, loyers, abonnements…) ?
  • Cet exercice est inconfortable, mais beaucoup moins douloureux que de le découvrir « en live » au deuxième mois d’arrêt.

    3. Évaluer l’intérêt d’une prévoyance individuelle

    Si votre entreprise ne propose pas de prévoyance suffisante, ou si vous êtes indépendant, une prévoyance individuelle peut :

  • compléter vos IJSS pour atteindre 70–80 % du net ;
  • verser un capital en cas d’invalidité ;
  • sécuriser votre revenu familial.
  • Comme toujours en matière d’assurance, l’idéal est de s’y pencher avant que le risque ne se concrétise, car après un diagnostic lourd, les assureurs peuvent refuser, exclure certaines pathologies ou majorer fortement les tarifs.

    Carrière, image professionnelle et arrêt longue durée : quelques repères

    Au-delà du salaire, un arrêt longue durée a un impact sur votre trajectoire professionnelle. Là aussi, mieux vaut être lucide.

    1. Non, vous n’avez pas à « culpabiliser »

    Le salarié en arrêt est protégé. L’employeur ne peut pas le sanctionner pour le seul fait de son arrêt, ni le pousser à revenir contre l’avis médical.

    En revanche, l’employeur a le droit de :

  • réorganiser le service ;
  • recruter un remplaçant ;
  • réfléchir à la suite, notamment s’il s’agit d’un arrêt très long.
  • 2. Garder un lien raisonné avec l’entreprise

    Selon votre état de santé, il peut être utile de :

  • maintenir un contact minimal avec votre manager ou les RH (sans travailler) ;
  • vous intéresser à l’évolution de votre poste, de votre service ;
  • préparer avec le médecin du travail une éventuelle reprise aménagée (temps partiel thérapeutique, changement de poste, télétravail…).
  • Ce lien facilite le retour, mais il ne doit jamais se faire au détriment de votre santé. Votre priorité reste votre rétablissement.

    3. Anticiper une réorientation si nécessaire

    Dans certains cas, la reprise sur le même poste n’est plus possible :

  • poste trop physique ;
  • environnement trop stressant ;
  • aménagements impossibles dans la structure actuelle.
  • C’est là que les dispositifs d’accompagnement deviennent précieux :

  • médecine du travail (visite de pré-reprise fortement recommandée) ;
  • conseiller en évolution professionnelle (CEP) gratuit ;
  • formation, reconversion, bilan de compétences, etc.
  • Le lien entre santé et carrière est souvent sous-estimé. Pourtant, un arrêt maladie longue durée peut être un point de bascule professionnel. Autant le préparer avec les bonnes informations, plutôt que le subir.

    En résumé, votre salaire en arrêt longue durée dépend de cinq facteurs clés : vos droits à la Sécurité sociale, votre ancienneté, votre convention collective, votre prévoyance et la durée totale de l’arrêt. Prendre le temps de les connaître avant d’y être confronté n’est pas du luxe : c’est une forme de gestion de risque… et un vrai réflexe de professionnel.

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